Le 23 décembre 2019 a été promulguée la loi d'orientation des mobilités (loi LOM), dans laquelle l’article 15 bis B a introduit la possibilité du retour aux 90 km/h de la vitesse maximale autorisée (VMA) sur les routes bidirectionnelles hors agglomération pour les sections relevant de la compétence du président du conseil départemental voire du maire ou du président d’EPCI dans certains cas.
Cette décision pouvait être prise après avis consultatif de la commission départementale de la sécurité routière, sur la base d'une étude d'accidentalité portant sur chacune des sections de route concernées.
Sur les deux années 2020 et 2021, 39 départements ont pris la décision de relever la VMA à 90 km/h sur tout ou partie de leur réseau. Au 31 décembre 2021, près de 34 000 km de routes départementales ont été relevées à 90 km/h sur ces 39 départements, soit environ 20 % du réseau départemental de ces départements
L’Observatoire national interministériel à la sécurité routière (ONISR) a entrepris en 2022 d’évaluer l’impact de ce relèvement. Pour ce faire, a été constitué le groupe témoin des 57 départements de France métropolitaine ayant conservé une VMA à 80 km/h sur l’ensemble de leur réseau jusqu’au 31 décembre 2021.
Le rapport mis en ligne en décembre apporte les enseignements suivants :
En 2018, l’ONISR avait déjà mené une évaluation de la mortalité des routes bidirectionnelles hors agglomération sur la période 2012-20161. L’étude avait mis en évidence qu’en moyenne 10 % des routes principales (RD et RN) concentraient 41 % de la mortalité sur ce réseau,
Commentaires :
Avec le recul, il faut convenir que, si la baisse de la VMA de 90 km/h à 80 km/h est une excellente mesure en faveur de la sécurité routière, force est de reconnaître que la gestion de cette décision n’a pas été une réussite. En conséquence, le gouvernement a été contraint fin 2019 de « lâcher du leste » face à une fronde naissante.
Bien sûr, les résultats de l’étude de l’ONISR ne surprennent pas. Le relèvement à 90 km/h se traduit par une suraccidentalité sur ces routes et probablement sur l’ensemble des départements concernés quelles que soient les routes.
Pour autant, le mal est fait et il sera difficile de le guérir. Pire, ce mal va s’aggraver puisque cette décision a donné le signal très gênant : celui de pouvoir abolir les règles générale du Code de la Route pour des règles « à la carte » à l’appréciation des collectivités locales et d'une commission sans grand moyen pour mener des évaluations. Le gouvernement a, d'ailleurs, récidivé en laissant aux villes le choix de la VMA : 50 ou 30 km/h.
Si bien qu’au gré de vos parcours entre départements et villes, les règles changent. Difficile pour les automobilistes de s’y reconnaître d’autant que bien souvent la signalisation est absente, ou peu visible, ou pire erronée. Plus grave est la mise à mal d’une règle absolue en matière de sécurité routière : son unicité sur tout le territoire et sa conformité aux règles de la Convention de Genève.
Dit autrement, à même situation, même règle pour l’automobiliste qu’il circule dans le Nord, le Midi ou dans les départements d’outre-mer.
Force est de constater que c’est actuellement un peu n’importe quoi sur nos routes en matière de VMA : 60, 70, 80 et 90 cohabitent dans une incohérence totale sur nos routes départementales. Idem en ville entre 20, 30, 50 et 70 km/h.
Pas étonnant que l’accidentalité repart à la hausse.
Saurons-nous remettre de la simplicité et de la lisibilité dans nos règles concernant la VMA ?
En Espagne, en ville lorsque vous avez une file de circulation, c’est 30. Si vous en avez deux, c’est 50. C’est simple, lisible et harmoniser sur tout le pays.
Sur nos routes départementales, on pourrait par exemple décider que c’est 90km/h quand la route a un accotement revêtu, sinon c’est 80 km/h.
L’automobiliste est capable de lire la route et des règles au regard de la route où il circule. Intuitivement, sur autoroute, il peut comprendre que dès lors qu’il n’y pas de bande d’arrêt d’urgence c’est 110 et non plus 130. encore faut-il que la règle soit la même sur tout le réseau autoroutier.
Pour aboutir à ces règles communes avec un savoir faire maîtrisé par les gestionnaires de voirie, il faudrait qu’elles soient régies par un ministère en charge des routes, ce qui n’est plus le cas depuis 2012 avec une organisation compétente au niveau des territoires ( ce qui nous ramène au temps des subdivisons de l'équipement). Mais cela est une autre histoire.