Le 26 janvier 2015, le gouvernement a présenté un plan de 26 mesures afin d’enrayer la hausse de la mortalité routière enregistrée en 2014 et de tenter d’atteindre l’objectif fixé de moins de 2 000 personnes tuées à l’horizon 2020.
L’analyse de ces 26 mesures permet de douter qu’elles soient suffisantes pour obtenir une baisse significative de la mortalité d’ici 5 ans. Seules, les mesures sur le téléphone ou l’alcool au volant pourraient permettre d’espérer un effet immédiat par l’effet d’annonce claironné par les médias.
Trois raisons majeures viennent appuyer ces doutes.
La première est que les plans d’annonce pris dans l’urgence ou en réaction à une situation donnent rarement un effet durable, pour le moins en sécurité routière. Ce scénario s’est déjà produit en 2011 avec un CISR (le dernier en date) convoqué en urgence pour répondre à la hausse brutale de la mortalité du premier trimestre 2011. Que reste-t-il des mesures prises à la suite de ce CISR si ce n’est qu’un protocole très ambigu pour empêcher l’annonce des radars fixes ou mobiles par les opérateurs.
Pourtant, la « recette » pour dérouler une politique de sécurité routière est connue depuis plus de vingt ans. Il s’agit de bâtir un plan sur cinq ans assis sur une identification précise des enjeux à partir d’un diagnostic approfondi des accidents et une programmation des mesures pour remédier aux types d’accidents les plus fréquents et les plus graves. Cette approche est encouragée depuis longtemps par l’Union européenne et son groupe d’expert auquel participe la France. Elle est appliquée en France à l’échelon départemental. Chaque Préfet doit produire un DGO (document général d’orientation) tous les quatre ans selon cette méthodologie. Les DGO 2013/2017 ont été produits par la plupart des départements et sont accessibles sur Internet. Les premiers correspondent à la période 2003/2007.
La seconde raison est que les mesures proposées ne s’appuient pas suffisamment sur la connaissance experte disponible et les propoistions qui en découlent . Outre les rapports du comité des experts du CNSR, d’autres travaux proposent des solutions comme celles figurant dans le rapport parlementaire rendu en 2011 au nom de la mission d’information relative à l’analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière. Plus récemment début 2013, une autre mission d’audit a été confié aux inspections générales des ministères de l’intérieur et de l’écologie. Cette mission propose également une série de recommandations remis au ministre de l'intérieur en juin 2014.
La troisième raison est que les mesures proposées cherchent à être trop consensuelles. Elles sont donc vidées de leur efficacité réelle. Certaines dont celles concernant les deux-roues peuvent même être contre-productives.
Globalement, on peut estimer que les 26 mesures, si elles sont toutes prises d'ci la fin 2015 (ce qui est peu probable), pourraient conduire à une réduction annuelle de la mortalité d'à peine quelques %. Cela ne devrait même pas permettre d’espérer passer sous la barre des 3000 personnes tuées en 2020, très loin de l'objectif des moins de 2 000 personnes tuées alors que cet objectif est possible à atteindre par des mesures plus volontaristes.